30 années, le 24 janvier 2022

Fabienne et moi nous sommes mariés le 24 janvier 1992. Une année forte en souvenirs et en évènements. Le 1er janvier, je devenais associé à 32 ans de l’étude Tavernier Gillioz de Preux Dorsaz. Le 24 janvier, nous convolions.  Le 4 octobre 1992, notre fils aîné Lionel découvrait le monde, deux ans avant sa sœur Ambre, née le 30 décembre 1994. Que dire de ces trente ans passés ensemble, soit pratiquement la moitié de notre vie globale jusqu’ici et les 3/4 de notre vie d’adultes ? Plutôt que de procéder par affirmation, imaginons un dialogue sous forme de questions, comme un interview de Fabienne et moi. Je tente de reproduire le plus fidèlement possible les propos qu’elle m’a tenus auparavant concernant les sujets abordés. Je répondrai tant pour l’un que pour l’autre. Fabienne aime quand je parle pour elle (gag)…..Et en plus, l’on vient de répondre à certaines questions de Matthieu Rougevin Baville, du même ordre pour le chaîne YouTube du GLYWO en ce qui concerne notre voyage. Q : Quel est votre meilleur souvenir de cette vie de couple et de famille ? V : Je pense que Fabienne dira l’arrivée dans notre vie de nos deux enfants. F : Arrête de parler pour moi et parle de toi et de tes propres opinions. Oui, bien sûr, mais j’ai aussi aimé nos voyages en famille, que ce soit à l’île de Pâques, en Amérique du Sud, en Indonésie, mais surtout au Botswana, et bien sûr en Namibie. Et puis notre foyer à Thônex, là où nous avons vécu en famille tous les quatre. Et toi Vincent, vie privée ou vie professionnelle ? Q : A l’opposé, quel fut votre plus mauvais souvenir : V : les décès assombrissent naturellement l’horizon, quels qu’ils soient, de parents ou d’amis. F : j’ai gardé un très mauvais souvenir de certains moments où je sentais Vincent, accaparé par son travail au point qu’il mettait à risque sa santé. Et puis j’ai dû aussi m’arrêter quelques semaines en automne 2011, alors que j’étais Présidente de juridiction et que j’en avais trop fait. Q : Comment avez-vous su concilier vos deux carrières professionnelles ? V : Nous avons mis en place des nurses, puis plus tard uniquement une aide ménagère  pour faire en sorte que nos enfants ne soient pas victimes de nos occupations professionnelles. Fabienne faisait aussi comme si elle ne travaillait pas, rentrant à midi pour déjeuner avec les enfants, après les avoir pris à l’école et les y ramenant, suivant chacune de leurs activités personnellement et les aidant pour les devoirs le soir en rentrant. Nous avons aussi toujours exprimé l’admiration que suscitait en nous la carrière de l’autre. F : Ce que Vincent n’exprime pas, c’est qu’il n’a rien changé dans son activité professionnelle à la naissance de Lionel et qu’il n’a en rien modifié ses horaires. Pour ma part, j’ai dû me résoudre à liquider mon étude qui marchait pourtant bien, n’arrivant pas à concilier le temps que je voulais passer auprès de mes enfants et la charge, notamment financière d’une activité d’avocate indépendante. J’ai suivi encore des dossiers et certains clients, donné des cours de droit à l’ESM et à l’école des professions de la petite enfance. J’ai aussi exercé des mandats politiques comme membre de la Commission fédérale pour la jeunesse, la fondation FHBM et la commission de contrôle des données informatiques de l’état. C’est aussi à cette période que j’ai pu rentrer dans la magistrature, ce qui était mon rêve. La protection des enfants, en tant que juge tutélaire, puis la justice pénale des mineurs m’ont passionnée pendant plus de 27 années, riches en émotions et charges diverses, parfois très lourdes. V : j’ai le sentiment que l’on n’aurait pas réussi à avoir nos trajectoires respectives sans le soutien et le respect de l’autre. Se sentir soutenu, en particulier dans les moments critiques est essentiel. Sinon vous finissez vite sur le bas coté de la route…. Q : Ce projet de partir sur les mers existe-t’il de longue date ? F : Cela a toujours été le rêve de Vincent. Je m’y suis adaptée et j’ai souhaité le préparer au mieux que je le pouvais.. V : en 1986, juste après mes études, j’ai effectué en voilier un tour en Méditerranée et Mer Rouge.  Revenir à Genève fut difficile. J’ai toujours dit à Fabienne qu’un jour, je repartirais avec elle sur l’eau. Depuis 2013, cette préparation a pris corps, car il fallait trouver le bateau qui nous conviendrait à tous deux. En 2015, nous l’avons trouvé et acheté suffisamment tôt, pour mieux l’apprivoiser et modifier éventuellement ce qui devrait l’être. En été 2017, j’ai eu un pépin (ou plutôt une alerte) de santé, ce qui a accéléré, ma décision de quitter le partnership de SCHELLENBERG WITTMER en me donnant deux ans pour finir ce que je pourrais. En avril/mai 2020, nous avons Fabienne et moi cessé nos activités professionnelles et pris une retraite anticipée. Nous avons déménagé en août en Valais. Depuis nous avons fait beaucoup de ski et achevé notre préparation pour prendre la mer en septembre 2021. Nous réalisons, cela étant, que nous avons eu une vie privilégiée, mais aussi un engagement professionnel au-delà de la moyenne. Ce voyage est une forme de récompense. Il est vrai que ce défi que constitue ce périple en bateau nous a permis de lâcher les amarres. Sinon, il est très difficile dans nos vies de nous arrêter tout en restant avec le même entourage, aux mêmes lieux de vie. C’est vrai pour moi, mais Fabienne m’a toujours dit qu’elle arrêterait son activité de juge qu’elle a pratiqué avec passion l’année de ses soixante ans pour éviter un trop-plein émotionnel. Q : quelle est la clef d’un mariage qui dure plus de trente ans ? F : je crois que la réponse n’est pas universelle. Pour moi, les valeurs telles que l’amour, le respect, la fidélité et l’humour sont fondamentales. Le dialogue l’est aussi et de pouvoir immédiatement formuler son opinion, d’échanger même si cela peut-être parfois volcanique. Je m’exprime tout haut, mais je ne boude jamais. V : l’humour est très important. Il permet de surmonter les inévitables tensions. Fabienne a du caractère et sait séduire. Je me prends à penser que je n’aurais pas voulu épouser une femme dépourvue d’intelligence et de séduction. Même si parfois, au long de ces 30 ans, j’ai eu à faire à forte partie. F : Ça y est, le voilà qui se victimise. Change de rôle, tu n’es pas crédible dans celui-ci. Pour exister auprès de Vincent, il faut savoir être forte, car il a tendance à faire de l’ombre, en répondant par exemple à ma place! V : qu’est ce que je vous disais….Ah, l’humour ! Q : Que pensez-vous faire après ce GLYWO ? V : on ne sait pas encore. Voyager, réaliser certains autres rêves. Je pense que l’on dispose encore d’une fenêtre jusque vers 70 ans, où tout est encore physiquement possible. Après c’est plus incertain. F : moi je rêve de m’occuper de futurs petits enfants, si l’on veut bien me les confier occasionnellement. Et puis, j’ai un projet de livre que j’ai écrit avant de partir que j’aimerais voir éditer, prendre des cours de comédie musicale et faire du développement personnel.   Q : un conseil pour de jeunes couples ? V : faites ce que vous sentez devoir faire, y compris des concessions, lorsque c’est nécessaire. F : je n’ai aucune légitimité à donner des conseils. Il n’y a pas de recette universelle. Chacun et chacune doit y mettre du sien et inventer sa vie de couple et de famille. L’essentiel est que chacun se réalise dans sa vie personnelle et professionnelle. Avoir une autonomie, une indépendance, notamment financière, est important à mes yeux. La période de l’égalité doit permettre à chacun de réussir professionnellement, mais aussi à arriver à une juste répartition dans le couple des soins et de l’éducation des enfants, mais aussi des activités domestiques du quotidien. Q : après trente ans, prêts à signer à nouveau pour trente nouvelles années? F : À l’échéance en 2052, on fera la course avec nos déambulateurs probablement. La vie sans Vincent serait triste, lui qui est totalement imprévisible et loufoque. Pourquoi pas un EMS avec des copains dans un joli coin ? V : non seulement je recommencerais depuis le début, mais à donf. Mais oui, je suis partant, surtout avec notre nouvelle vie, la troisième. Pour la quatrième ( post entrée EMS ) on fera au mieux. Vivons l’instant présent et accumulons de futurs souvenirs. Je crois que l’expression « carpe diem » caractérise notre vie depuis pas mal de temps et est adoptée par tous les deux.