2021, l’odyssée de l’espèce : Jusqu’où?
Écrit par Vincent le 13/11/2021
À la fin du XXème siècle, Stanley Kubrick (surnommé par certains Stankey Lubrik) réalisa une oeuvre majeure. Celle qui mit en scène le passage du monde des primates (on se rappelle la scène initiale) à celui des voyages interstellaires.
2001 ou l’odyssée de l’espace. Un film qui a bien vieilli.
Un film qui se révèle de très grande actualité, à mon humble avis.
Je me rappelle encore cette scène « très ordinaire » de cet homme séjournant dans un Hilton gravitant autour de la terre et parlant à sa famille sur un petit écran. Une forme de video call.
A l’époque, c’était de la pure science fiction.
Aujourd’hui des millions de personnes sont connectées et se parlent en face time ou sur WhatsApp en se voyant depuis leur portable. Jamais d’ailleurs les fosses nasales n’ont autant été explorées par caméra portables interposées, tant il est difficile de trouver le bon axe de vision lorsque l’on se parle…
Depuis la pandémie, le nombre de vidéo conférences a littéralement explosé et remplace dans 80% des cas des séances qui appelleraient un moyen ou long déplacement. Je m’égare, ce n’est pas le sujet.
Dans ce fameux film, l’ordinateur HAL (il était fait allusion à IBM, soit les trois lettres précédant dans l’ordre alphabétique celles de HAL) tente de prendre le contrôle de l’expédition spéciale et cherche à se débarrasser des astronautes. Il faut finalement le débrancher pour éviter que l’équipage humain ne soit purement et simplement éliminé du vaisseau spatial.
Et bien cette semaine, je me suis pris à penser que nous étions très proches de la nécessité de débrancher cette hyper intelligence artificielle qui nous gouverne partout.
On est loin de la machine à laver et de mes piécettes qui ont suscité des réactions de beaucoup d’entre vous. Certains se sont arrêtés à l’histoire de ce lave-linge de Cadiz, d’autres ont plus ou moins compris le message au deuxième degré. Peu sont restés indifférents devant cette forme d’autodérision.Je m’autorise donc à persister, de temps à autres, dans certaines digressions occasionnelles.
Mon propos est de vous relater ce qui me frappe au niveau de la manière dont nos vies sont maintenant suspendues à des autorisations ténorisées sous forme de QR code, et en quoi il n’est plus possible de faire revenir l’humain dans ces processus.
Je reçois sur mon email un message de Swiss Airlines m’indiquant que pour revenir en Espagne, il me faudra m’enregistrer en ligne auprès d’un organisme officiel espagnol qui doit être plus ou moins le pendant de l’OFSP. J’avais du procéder de la sorte depuis les Canaries pour venir en Suisse, a priori rien d’anormal. Et en plus j’avais réussi, sans trop de problèmes à remplir le formulaire en ligne de l’OFSP, que je trouvais raisonnable.
Je me décide mercredi soir à procéder comme demandé et m’inscris sur le site espagnol.Le nombre de questions posées est tout simplement hallucinant. J’en viens à me demander en quoi ces questions sont toutes pertinentes, dans un but simplement épidémiologique.
Pas moyen de m’insurger. Il faut continuer de répondre et veiller à ce que chaque donnée corresponde à la réalité, car des messages successifs m’informent que si tel n’est pas le cas, je m’expose à des sanctions diverses, administratives ou pénales. Apparemment, le droit espagnol ne craint pas une application extra-territoriale, à l’instar du modèle américain honni de tous.
Je parviens au stade 3 de ce parcours numérique pour comprendre qu’il ne sert à rien d’aller plus loin. Mes données resteront stockées. Je ne peux progresser tant que je ne serai pas à moins de 48 heures de mon heure d’arrivée sur sol espagnol. On aurait pu me le dire d’emblée. Je n’aurais rien initié avant ce délai.
Plus délicat, je reçois un email m’indiquant les codes qu’il me faudra utiliser pour retrouver mon formulaire incomplet. Il y a là un code de deux lignes et un nombre à six chiffres. Je me dis que j’ai intérêt à ne pas égarer cet email, sans quoi je ne pourrai retrouver Crazy Flavour aux Canaries.
Je reprends l’exercice jeudi soir. On est largement dans le délai des 48 heures. Je suis confiant dans mes capacités de faire face à un exercice à peine plus compliqué que mon lave linge de Cadiz.
Je retrouve l’email. Je clique sur la formule de deux lignes, j’introduis le mot de passe et je suis salué par un «Bienvenue Jeanneret Grosjean». Seulement voilà, ce formulaire apparemment identifié ne me permet pas d’aller au stade suivant. L’on m’indique simplement que le formulaire suivant ne peut être retrouvé, lorsque je veux sauvegarder l’existant et «continuer ».
Un début de frisson me parcourt l’échine.Je vais devoir faire face à un Hal ibérique, dans un combat que je devine singulier.
Je commence par me dire que je vais recommencer avec une nouvelle application, comme si la première n’existait pas. Je remplis donc à nouveau un formulaire et miracle, je passe presque toutes les étapes. Jusqu’à l’avant dernière où un message rédigé par un informaticien facétieux m’indique qu’un formulaire identique a déjà été enregistré est que seul ce premier formulaire doit être continué.
Hal m’indique en termes simples qu’il ne sera pas si simple de le dribbler.
Je découvre alors qu’il existe une application distincte qui permet de s’enregistrer plutôt que d’y procéder par le website du gouvernement espagnol.
Victoire, dis-je à Fabienne, nous allons le faire ensemble et on y parviendra ensemble.
Je télécharge l’application et en parallèle Fabienne et moi répondons - sur nos I-phones respectifs- à une trentaine de questions diverses et sans pertinence aucune. Bizarrement la typographie et la séquence des questions ne me parait pas identique à celle du website.Je triomphe.
Hal a un petit frère auprès duquel je pourrais obtenir le sésame recherché, sans que Hal ne puisse s’y opposer.
C’est mal connaître le héros de Kubrick, car à la toute dernière phase, le petit frère de Hal m’oppose, contrairement à Fabienne, le fait que mon formulaire existe déjà. Le QR code m’est refusé.Me voilà, ô rage et ô réel désespoir, revenu à la case zéro.
Fabienne se garde de triompher. Il est tard, me dit-elle, dormons là dessus et réessayons demain.
Je consulte toutefois le site du gouvernement espagnol pour découvrir qu’il existe un email hotline auquel l’on peut s’adresser. Je choisis des termes anglais simples pour exprimer un début de détresse et forme une supplique en définitive directe et facile à comprendre. Que quelqu’un efface, dans un ministère espagnol quelconque, mon premier formulaire et me permette de recommencer.
Le lendemain matin, nous avons quelques courses à faire. J’explique à Fabienne que cela serait vain si l’on ne peut retourner en Espagne. Café pris, je me décide à affronter à nouveau Hal.
Je lis la réponse-type que j’ai reçue par email. Rien de bien intéressant, ou que je ne savais pas déjà. J’essaie, à nouveau en désespoir de cause. Toujours le même blocage. Hal commande tout et aucun humain ne se manifeste.
Je consulte le website pour découvrir qu’il n’existe aucune hotline téléphonique. En revanche l’on peut déposer plainte sur une autre adresse email. Ce que je fais. Je reçois alors un message type en espagnol m’indiquant que ma plainte sera traitée en temps utile.Diable, Hal est partout, même derrière cette autre autorité chargée de traiter ma plainte. Et dans 24 heures, si je n’ai pas ce QR code, je serai définitivement mal pris.
Je tente d’identifier un autre site sur le net et en trouve un répertoriant les problèmes pouvant se poser. En lisant attentivement, je découvre que Hal a déjà fait d’autres victimes.
L’on suggère que, certaines fois le numéro de passeport enregistré ne permet plus de débloquer le formulaire. Il faut alors recommencer une application en utilisant son numéro de carte d’identité.
Tien, tiens. Et si j’essayais. Qu’ai-je à perdre ? Je ne tricherais pas.Je recommence en utilisant une autre pièce de légitimation…Ma carte d’identité.
Je fais davantage confiance à l’Apps qu’au website. Et je remplis pour la cinquième fois un formulaire et redonne une trentaine de données personnelles non pertinentes en matière de lutte anti-Covid 19.
Vient le dernier pas. Celui dans lequel, toutes données enregistrées, une petite roue tourne sur l’écran. Je revois l’image choisie par Kubrick pour montrer Hal à l’œuvre. Cette lumière rouge dans la caméra. C’est frappant de similitude.
Le suspense est intenable. Il dure 15 secondes.
Et…. Il débouche sur un QR code. La porte de retour aux Canaries s’est subitement ouverte. Sans qu’aucune intervention humaine ne puisse être remerciée. Sans que quiconque n’ait pris le soin de me revenir à la lecture de mes messages de SOS.Il faut en tirer une leçon.
Il est grand temps que nous reprenions le contrôle de nos vies et déplacements. L’intelligence dite artificielle est déjà en train de régner sur nos existences et les frontières ressuscitées par la Covid-19 ont légitimé un invraisemblable et inextricable entrelacs administrativo-numérique qu’il faut combattre et asservir.
Que l’on pense à nos vies quotidiennes, truffées de reconnaissances faciales ou digitales, de nos codes alphanumériques qu’il faut stocker dans des coffres forts numériques eux-mêmes codés.
Quiconque ne se soumet pas est isolé, ignoré, voire délaissé inexorablement.
Bien sûr que l’on gagne en efficacité. Mais combien perd-on en déshumanisation ? Et en maîtrise de nos vies ?
Ce matin, Fabienne et moi avons pris l’avion sans le concours d’un seul être humain, sauf à l’embarquement final.
Nous avons reçu l’avant-veille notre carte d’embarquement avec un code numérique. Lequel nous a permis d’obtenir sur place, par un robot lecteur, une étiquette pour chacun de nos bagages. Ensuite de quoi, nous avons scanné notre carte d’embarquement et l’étiquette pour mettre directement notre bagage sur le tapis roulant.
Puis nous sommes montés dans l’avion après avoir fait lire notre boarding pass et montré une pièce de légitimation, sans qu’un mot ne soit échangé.
Hal est devenu tout puissant.
Aujourd’hui tout pouvoir étranger sait que prendre le contrôle de la Suisse ne nécessitera pas qu’une moindre cartouche d’armes à feu soit utilisée. Un bon virus informatique dans le logiciel SAP d’exploitation de Migros et Coop suffira en 15 jours à mettre le pays à genoux. Sans mème parler de Swisscom, Sunrise et des producteurs d’énergie.Les puissants de ce monde ne sont plus les généraux, mais les informaticiens et leurs cousins, les hackers.
Il faut reprendre le contrôle de nos existences et de nos déplacements qui sont monitorés chaque minute de par le fait que nous ne nous séparons plus jamais de nos portables. Il faut que le pilote dans cet avion puisse interrompre le pilote automatique de nos vies, et décider de la suite (je ne parle pas de notre vol Swiss Air, of course).
C’est urgent. Autant que la lutte pour le climat, étant rappelé ce que tous les Hal de notre monde consomment énormément d’énergie…
C’est impératif. Sinon la sphère privée, l’autonomie de décision et à terme la démocratie, seront des notions historiques, que nos générations de super-Hal s’empresseront d’effacer de leurs disques durs.
Sur Crazy Flavour, je prendrai garde à ce que l’électronique et l’informatique restent un « nice to have », et ne deviennent jamais maîtres à notre place.
Bon vent…Salut à toi Stanley. Tu fus un visionnaire, même si ton film ne contient aucune référence au code QR….
Post scriptum :
Nous avons réussi à passer les contrôles à Teneriffe, après un kiss landing.La psychose Covid a remplacé celle du terrorisme. Pas de passeport ou pièce d’identité demandée. Pas de bagages examinés. Pas de questions sur notre séjour. Juste la focalisation sur ce code QR ibérique relatif à la Covid. Juste une forme d’hystérie ambiante dans les contrôles effectués sur la base de ce seul code QR.
je précise enfin, pour éviter tout malentendu, que je ne suis pas du tout antivax, loin s’en faut. Et que j’ai voté en faveur de la loi Covid.
Qu’il est bon de se retrouver sur le Crazy Flavour…..